Odon a laissé des traces, des signes qui sont les témoignages d’une expérience artistique hors du commun. Ils sont à Vannes dans la Galerie de Cécile Loiret qui a choisi – avec Colette, la femme d’Odon et avec une grande justesse – dans l’immense richesse du fond de l’artiste, les indices qu’Odon a laissés avant de partir. Vous aurez peut-être parfois le sentiment que, pressé de rejoindre les mystères de l’invisible, Odon a déposé ces messages sur le chemin sans tout à fait les avoir terminés. Ne vous y trompez pas : ces hiéroglyphes brisés, ces glyphes de papiers finement découpés, ces vortex tressés sont des indications précieuses. Ce sont les instruments de navigation dont s’est servi Odon durant son voyage sur notre planète. Vous allez découvrir des cartes dérobées, des codes secrets, des secrets chuchotés. Si ces œuvres parlaient ce serait dans une langue un peu étrange. Forcément. Odon était un shaman, un sorcier qui voyageait dans son être propre qui était l’univers. En réalité utiliser le passé n’est pas de mise. Un shaman ne meurt pas. Un sorcier est immortel. Peut-être pas de la façon dont on croit. Ces gens-là sont des êtres à part qui n’ont que faire de nos mesures ordinaires du temps et de l’espace. Cécile et Colette ont mis au jour avec une intuition subtile et savante les preuves qu’Odon parlait aux sphères célestes et que maitrisant leurs langages il visitait leurs mondes invisibles – et par l’effet de sa générosité toute humaine il nous a laissé un codex dont nous pouvons saisir sinon le sens au moins la direction. C’est que le sens des œuvres exposées dans la Galerie de Cécile Loiret n’a pas vocation à être expliqué d’une façon trop rationnelle – ce ne sont pas pour autant des œuvres abstraites ou conceptuelles ce sont des messages venus d’ailleurs, issus d’un monde hors du nôtre, mais peut-être beaucoup plus proche qu’on ne croit surtout en ces temps qui nous interrogent. Ce sont des œuvres pleines, lyriques, touchantes. Vous songerez peut-être en les découvrant qu’elles pourraient être les échos brisés et bouleversants de la Musique des Sphères selon l’idée d’origine pythagoricienne que le cosmos est régi par des rapports numériques harmonieux. L’œuvre d’Odon est une invitation au voyage cosmique car il en fut familier. Et donc la direction (sinon le sens) que vous allez repérer dans l’exposition ne pourra pas vous échapper : les œuvres exposées font ressentir la puissance des forces giratoires qui émergent de chaque œuvre. Une énergie centrifuge venu du fond des âges et du plus profond de l’univers pointe vers là où Odon est parti et là où il nous attend.
Mon atelier est mon univers, tout l’univers est dans mon atelier disait-il. Son regard diffusait une lumière solaire. Ses gestes inlassablement répétés tendaient le ressort de l’horloge de la vie, disait son ami Roger Boulay. Travail minutieux. Travail de retranscription de ce qu’il entendait, de l’étrangeté de ce qu’il entendait ? Oui. Cela éclaire pourquoi Guy Houdouin a choisi de devenir Odon en 1997, en référence à un célèbre abbé du monastère de Cluny au Xe siècle, mais aussi parce que ce nom est l’anagramme de l’italien nodo c’est-à-dire le nœud. Ce nouveau nom , ce nouveau baptême le reconnectait à sa passion de toujours pour le tressage.
Vous allez découvrir les retranscriptions de cette musique intérieure. Ce travail s’apparente peut-être aux enluminures de l’époque médiévale. Ce fut un travail ininterrompu sur les nœuds pour convoquer l’au-delà et faire des sutures entre l’au-delà et l’ici-bas quand tant de fractures mettent le monde à mal : Odon est d’une sidérante modernité !
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