Le Sultanat d’Oman, ancien protectorat britannique d’Aden, pays de rêve et de tourisme, vient d’être victime à l’automne 2048 d’un typhon qui a fait des dizaines de morts, détruits des quartiers entiers et causé des inondations sans équivalent dans Mascate, une des plus anciennes villes historique du Golfe d’Arabie. Chaque année, les autorités locales appréhendent cette saison. De violentes inondations, atteignant parfois jusqu’à 1,80 m de hauteur, ont touché plusieurs régions du sultanat. En 2011, la tempête tropicale Keila sur les côtes du sultanat d’Oman a fait 14 morts, quelque 200 blessés et des dizaines de maisons ont été détruites par la violence des éléments[1]. Depuis des années le golfe Arabique, désertique, situé sur la façade Est de la péninsule arabique subit des pluies diluviennes destructrices. Dans cette zone les eaux chaudes de la mer d’Arabie sont la source d’un mécanisme d’augmentation des flux d’humidité vers les terres, dû à celle de la température des eaux le long des côtes africaines. Il est à l’origine des variabilités de précipitation et du régime des vents en Afrique de l’Est au point d’en influencer durablement le climat à des milliers de kilomètres de là, en Inde.
On regardait nos pieds mais le danger venait du ciel. Les hommes regardaient leurs pieds. Ils étaient inquiets : suite au réchauffement climatique, l’eau allait monter au moins d’un mètre à chaque degré supplémentaire[2]. Ils se trompaient. La fonte des banquises s’est accompagnée d’un soulagement du poids pesant sur la croute terrestre qui se soulève limitant l’élévation du niveau des mers. Le vrai danger, c’est au dessus de nos têtes qu’il était. Comme le disent les Français, c’est le ciel qui nous tombe sur la tête. Le nombre des cyclones et des typhons ne cesse d’augmenter, causant des ravages y compris maintenant bien au-delà des villes côtières. Il n’est plus rare d’observer des vents supérieurs à 300 km/ dans certaines régions comme aux Philippines. Les vitesses maximales que l’on croyait atteintes dans les années 2015 n’ont plus cessé de gagner en puissance et vitesse : 340 km/heure viennent d’être mesurés ces jours ci entre les Caraïbes et le Guatemala. Partant des mers chaudes, des monstres climatiques naissent en permanence qui dévastent les régions les plus exposées à leurs caprices. Les vents poussent la mer dans les terres et disloquent maisons et paysages. L’évaporation massive des eaux au contact des zones les plus chaudes a créé les conditions d’une couverture nuageuse bouleversant les échanges thermiques historiques. En bloquant le rayonnement solaire et la dissipation du réchauffement d’origine terrestre cette couverture capricieuse réduit opportunément les effets du réchauffement climatique. Elle transforme la terre en une gigantesque cocotte minute soumise à des tourbillons, des vortex d’une puissance jamais connue. Une étude publiée en 2014 dans la revue Nature Climate Change considère que cette augmentation des changements climatiques modifie les régimes de précipitations et accroît les risques d’inondations importantes partout dans le monde. L’inondation du bassin du Nil en 2034 a fait 1600 morts et touché 318 000 personnes. Les transformations du climat dans ces régions sont marquées par la croissance d’alternances entre des températures extrêmes (+5 degrés par rapport aux températures des années 2000) et des périodes pluvieuses tout aussi violentes[3]. En Amérique du sud, aux Etats-Unis, en Europe du Nord, en Asie du Sud-est, en Afrique du sud, aux Philippines, au Bengladesh, partout des phénomènes atmosphériques d’une violence inimaginable détruisent des villes entières, des zones de pêche. Les vents sont devenus si puissants qu’ils emportent loin dans les terres des vagues aussi hautes que des arbres qui ravagent les rivages et les fragiles habitations des pécheurs et des résidents des bords de mer.
Une catastrophe économique sans précédent. Au cours des 30 dernières années, les catastrophes climatiques ont touché 90 millions de personnes dans le monde arabe, représentant un coût direct d’environ 22 milliards de dollars et un coût indirect bien plus élevé encore. On ne compte plus les millions d’euros de perte des fermes d’aquacultures détruites ou endommagées par la violence des tempêtes dans le nord de l’Europe. Des conditions météorologiques extrêmes affectent le secteur du tourisme, et l’agriculture. Les pluies diluviennes, outre qu’elles sont à l’origine d’inondations répétées et de plus en plus fréquentes, érodent les sols et affectent durablement les rendements agricoles. Les analyses récentes démontrent un double phénomène : l’aridité croissante des régions arides, de même que l’augmentation de la fréquence des inondations soudaines. Avec l’augmentation des températures moyennes, il fallait s’attendre à une augmentation des pénuries d’eau et de l’insécurité alimentaire. Déjà des régions entières tant en Europe qu’au Brésil produisent moitié moins des rendements agricoles que les décennies précédentes avec à la clé des difficultés croissantes pour les populations locales. En Europe, le coût des inondations est passé d’une moyenne de 4,9 milliards d’euros entre 2000-2012 à 23,5 milliards d’euros par an vers 2040, soit le double des coûts enregistrés en juin 2013 en Europe centrale pour cause de changement climatique. En 2020, en raison d’un épisode de pluviosité importante en Allemagne et dans une partie de l’Europe du nord et centrale, ce chiffre dépasse déjà les 14 milliards d’euros. A la fin de l’actuelle décennie, en 2050, le coût annuel des dégâts provoqués par les inondations dans le monde pourrait dépasser les 1000 milliards de dollars par an. Même si les investissements étaient faits pour protéger les villes concernées contre la montée des eaux, les seuls dégâts causés par les inondations seraient de l’ordre de 60 à 63 milliards de dollars par an[4]. Des montants considérables qui font plier les genoux aux compagnies d’assurances qui ont vu leur valeur en bourse dégringoler. Côté santé, la progression de l’humidité dans nombre de régions a eu des conséquences terribles sur certaines maladies. Les allergies, l’asthme et les broncho-pneumonies liés à la prolifération des acariens et des moisissures ont explosé.
Des forces titanesques sont en train de modifier la terre. Des sociétés entières sont en voies de disparition. Pensant à la montée des eaux, de nombreux reportages des années 2010-2020 mettaient l’accent sur les exilés climatiques venus des iles englouties. Hélas, ils avaient sous-estimé les catastrophes venues du ciel. Une variante du déluge tombe tous les jours sur les différentes parties du globe alors que d’autres ne reçoivent plus une goutte d’eau, rendant des terres impropres à la vie. Des phénomènes inscrits dans l’histoire tourmentée de la Terre. Connue pour avoir inventé l’écriture et l’architecture, la civilisation sumérienne victimes de la sécheresse n’a pas laissé de traces dans l’histoire de l’humanité, selon l’American Geophysical Union. Pour le géologue Matt Konfirst, une longue période de sécheresse s’est abattue sur la région du Moyen-Orient en 4200 av. J.-C. : évaporation de la mer Rouge et de la Mer Morte, chute du niveau des eaux du lac de Van en Turquie. Cette diminution brutale des précipitations a réduit les substances vitales pour les populations locales expliquant l’abandon en quelques décennies des colonies mésopotamiennes en Syrie. S’effondrent simultanément l’Empire Akkadien, les cités urbaines de l’Indus, et le gouvernement centralisé de l’Ancienne Egypte. Ces faits coïncident avec un bref épisode d’extrême aridité de la mousson indienne et africaine, en Méditerranée orientale et en Mésopotamie, alors qu’au contraire le niveau des lacs des hauts plateaux d’Amérique du Sud s’élève brutalement. Depuis, ces oscillations se poursuivent, tous les 1000 à 2000 ans, jusqu’à l’époque actuelle, la plus récente correspondant au petit âge glaciaire. A contrario, le réchauffement postglaciaire en région tempérée, et l’augmentation synchrone des précipitations de 20-30% en zones tropicales, permettent l’épanouissement des sociétés néolithiques dans des régions inhabitables quelques siècles auparavant. De quoi confirmer que l’histoire de toutes les civilisations sont dépendantes des modifications climatiques et donner de quoi réfléchir à celles qui aujourd’hui se croient invincibles[5].
La prise de conscience tardive d’une modification climatique majeure. Aujourd’hui, des millions de citoyens constatent que pas grand-chose n’a été anticipé et prévu pour mettre à l’abri et protéger ceux qui subissent de plein fouet les conséquences des fureurs climatiques. Les transferts d’énergies entre régions froides et chaudes se sont amplifiés. La conversion d’énergie thermique en énergie cinétique a eut pour effet de créer des vortex d’une puissance infernale qui affectent désormais une majorité de pays. Les nations ont été impuissantes à réfréner l’augmentation des gaz à effet de serre et des pollutions atmosphériques dues à l’urbanisation croissante. L’attentisme des uns et la résistance des autres ont laissé s’installer une situation devenue incontrôlable. Les résistances « morales » – en d’autres termes la peur des risques encourus – et les égoïsmes politiques auront été plus forts que les dizaines de milliers des victimes climatiques annuelles.
L’objectif d’éviter, grâce à l’ingénierie climatique, un réchauffement supérieur de 2 degrés par rapport aux températures moyennes du siècle dernier aura été un échec complet. Pour les uns, il s’agissait de mesures destinées à stabiliser le climat et les températures en hausse constante, pour les autres, plus radicaux, il s’agissait de trouver des solutions d’ingénierie globale afin de contrecarrer les évènements climatiques les plus violents en cours de développement. Pour les experts, il existe deux grands types de techniques. L’une consiste essentiellement à chercher à absorber le dioxyde de carbone responsable de l’effet de serre. La seconde est de renvoyer une partie du rayonnement solaire afin d’en limiter les effets sur le réchauffement climatique ce qui aboutirait à un moindre ensoleillement, donc à une baisse des températures. Un des projets envisageait de « prélever l’eau de mer et de la pulvériser dans l’atmosphère pour former des nuages, qui eux vont faire obstacle au rayonnement solaire incident. » La Terre qui survit depuis des centaines de millions d’années à des modifications climatiques extrêmes aura choisi sans attendre la deuxième solution : elle s’est couverte de nuages en abondance et a augmenté dans des proportions inimaginables ses échanges thermiques. La monstruosité des nappes nuageuses qui se sont développées ces vingt dernières années ont aussi diminué la luminosité solaire de presque 2% compensant ainsi – Ironie de la vie – le réchauffement climatique en cours. Mais cela au prix d’un surcroit des masses d’eau retenues à l’origine d’une pluviosité inconnue jusqu’à lors.
Les experts enfin d’accord pour engager des projets de Terra formage. Les différentes organisations internationales sont désormais face à une transformation considérable de l’environnement et des modes de vie d’une majorité de nations. Les études de ces dernières années ont montré que la progression des instabilités climatiques est associée, en Atlantique nord-est, à des déplacements de grande amplitude des fronts polaires et subpolaires. Sous les tropiques, les changements abrupts se manifestent par des changements de température, mais surtout par des changements hydrologiques souvent d’ampleur considérable[6]. Les contrastes climatiques sont si importants entre les différentes régions du globe qu’ils engendrent des monstres atmosphériques dus à l’augmentation de la vitesse maximale des vents. Pour certains scientifiques, après quelques années de troubles violents nous reviendrons à la normale ; pour d’autres nous allons plutôt vers un nouvel épisode de glaciation. Ce qui semble vraisemblable lorsque l’on constate que des pays comme Liban, la Palestine, Israël et la Jordanie reçoivent désormais des quantités de neige inconnues jusqu’à ce jour. En Mongolie le désert piège des voyageurs dans des inondations soudaines. Ainsi, à l’Apocalypse promis d’un réchauffement planétaire intense rendant le Terre inhospitalière, se substitue un consensus qui nous annonce les prémisses dans un nouvel âge glaciaire et d’une transformation durable de la géographie du globe. Car les évènements climatiques en cours n’ont pas que des effets négatifs. Des déserts reverdissent, des régions en déficit hydraulique chronique revivent et attirent des populations nouvelles. Les gouvernements réunis à New-York par la Commission des Dangers Majeurs des Nations Unies sont invités à prendre des décisions fortes afin de limiter les effets systémiques des modifications climatiques affectant les populations et l’économie mondiale. Après avoir modifié en urgence les contraintes architecturales des bâtiments en construction pour résister aux inondations, aux vents plus violents et revus l’inventaire des zones constructibles, les experts se concentrent sur les possibilités de détourner ces énormes masses nuageuses vers des régions qui tireraient profit à être plus arrosées. Car le paradoxe est de voir les pays exposés aux sècheresses ne pas bénéficier de cette eau dont ils ont désespérément besoin. Plus de deux milliards de personnes ne bénéficient pas d’une eau buvable et des milliards de kilomètres carrés ne sont pas suffisamment arrosés. Les visionnaires qui rêvaient de voir la dépression de Quatarra être rempli d’eau à partir de la Méditerranée reviennent à la charge. La création de mers intérieures, la réalisation de rivières artificielles afin de canaliser l’eau vers des régions en déficit hydraulique n’est plus un sujet tabou. Après des années de multiples projets d’ingénierie climatique audacieux proposés aux différentes instances internationales sans jamais pouvoir être mis sérieusement en œuvre, certains spécialistes n’hésitent plus à évoquer les possibilités de la terraformation. Les hommes de l’ancien temps se sont toujours arrangés des climats extrêmes et y ont survécus. Nos sociétés actuelles, hyper technologiques en seront-elles capables !? De Mascate, Golfe d’Oman, 15 mars 2064
Denis Ettighoffer
En savoir plus : Une carte du monde disponible sur Internet répertorie en direct les catastrophes climatiques. Le but de cette carte est de rendre compte des problèmes climatologiques qui affectent la planète. http://hisz.rsoe.hu/alertmap/index2.php Et encore, « Bidouiller » le climat avec la géo-ingénierie – Le développement des activités cycloniques de ces dernières décennies – http://www.actu-environnement.com/ae/news/paleoclimatologie-climat-actuel-11843.php4
[1] En juin 2010 le cyclone Phet avait tué 16 personnes dans le pays. En 2007, le cyclone Gonu avait fait 49 victimes dans le Nord du pays et fait pour 3,9 milliards de dollars de dégâts.
[2] À cause du changement climatique, le niveau des mers tend à s’élever et les îles Maldives – et bien d’autres – disparaîtraient sous les eaux à la fin du siècle du fait de leur faible altitude dont le point culminant est de 2,3 mètres.
[3] http://www.developpementdurable.com/insolite/2009/09/A3050/catastrophes-naturelles-36-millions-de-refugies-a-travers-le-monde.html
[5] Le désastre socio-économique engendré par la sécheresse au Sahel des années 70-80 n’a rien d’exceptionnel. Une aridité beaucoup plus prononcée a sévi entre 1200 et 1000 ans avant JC au Sahel, et de façon synchrone au Mexique où elle est la cause la plus probable de l’éclipse de la civilisation Maya “classique”.
Pour la vitesse du vent, ce fut 370 km/heure les rafales maximum enregistrée par l’US Navy alors que le typhon Yolanda était en mer, avant donc qu’il ne touche les iles des Philippines… cela l’année dernière (2013 donc).
Sous la plume d’Edgar Nazare dans L’Ere nouvelle :
N° 3 – L’homme peut faire des cyclones et dompter leur énergie par Edgard Nazare
N° 8 – Comment anéantir les cyclones tropicaux par Edgard Nazare
Pour la vitesse du vent, ce fut 370 km/heure les rafales maximum enregistrée par l’US Navy alors que le typhon Yolanda était en mer, avant donc qu’il ne touche les iles des Philippines… cela l’année dernière (2013 donc).
Sous la plume d’Edgar Nazare dans L’Ere nouvelle voilà environ 30 ans :
N° 3 – L’homme peut faire des cyclones et dompter leur énergie par Edgard Nazare
N° 8 – Comment anéantir les cyclones tropicaux par Edgard Nazare
J’avais parlé de ce typhon en ces termes :
» J’ai suivi ce typhon dès le 6 nov car on annonçait (l’US Navy) des rafales à 330, puis à 370… alors qu’il était en mer. Son nom local est Yolande.
L’an passé, j’étais sur la trajectoire de Bopha (Pablo nom local) et les rafales étaient seulement de 220 km/h… Fort heureusement pour moi, il a dévié de 150 km… Mais cela a été la catastrophe mondiale la plus grande de 2012…
Là avec un front de 600 km et de tels vents… A la différence des autres, il se déplaçait bien deux fois plus vite (donc moins d’eau à tomber)… mais comme poussant un mur d’eau maritime… ce qui a dévasté sur un km en profondeur… »